Trente et quarante
Sous une apparence de charmante bonhomie, Georges Courteline qui avait souffert de la vie comme tous ceux qui ont le cœur trop sensible, cachait une certaine âpreté.
Rien n’irritait plus le romancier et dramaturge que ces propos désobligeants que les littérateurs en herbe de notre époque tiennent volontiers entre deux apéritifs, lorsqu’ils parlent de leurs grands aînés. Un groupe s’est formée, depuis quelques années, qui réunit en une agape fraternelle, de temps à autre, les hommes de lettres dont l’âge est entre trente et quarante ans.
— Dieu, que ces réunions sont ridicules ! s’écria un jour un jeune homme au café. Pour ma part, je trouve cela absurde. D’abord, passé trente ans, tous les hommes deviennent des idiots.
Courteline l’interrompit soudain.
— Ah ça… quel âge avez-vous donc, mon jeune ami ?
— J’ai vingt-huit ans.
— Vous promettez.
« La Vie parisienne. » Paris, 1929.