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Les anecdotes
8 janvier 2022

La Parmentière

parmentier_montdidier

C’est ainsi que la pomme de terre fut d’abord appelée, du nom de Parmentier qui, le premier, introduisit en France la culture de ce précieux tubercule comme aliment. 

Parmentier a donc rendu un immense service à l’humanité; à ce titre il mérite que son nom soit rappelé et signalé à la génération présente, comme un des hommes utiles que notre province s’honore d’avoir vu naître. 

Antoine-Augustin Parmentier, naquit à Montdidier, le 12 août 1737, fils de Jean-Baptiste-Augustin Parmentier, marchand linger, et d’Euphrosine Millon, sur la paroisse Saint-Sépulcre, dans une maison de l’ancienne rue de la Mercerie, n° 25, qui porte aujourd’hui une inscription rappelant la naissance de cet illustre enfant.

Parmentier, encore en bas âge, perdit son père et resta à la charge de sa mère dont la position de fortune était des plus modestes; ce fut elle qui entreprit son éducation et qui lui enseigna les principes de la langue latine. A peine âgé de treize ans, Parmentier fut placé chez un pharmacien de Montdidier où il travailla avec ardeur pour compléter son instruction. En 1755, il fut appelé à Paris par son parent Simonnet; il y fit de rapides progrès.

En 1757, il partit comme pharmacien pour l’armée de Hanovre, sous les ordres de Bayen qui, aidé de Chamousset, intendant général des hôpitaux militaires, le fit rapidement passer par les grades intermédiaires et obtenir le grade de pharmacien en second de l’armée. Pendant la campagne, il se distingua par son dévouement : une épidémie dangereuse s’était déclarée dans les hôpitaux; il en brava les atteintes avec intrépidité, anima par son exemple le zèle des pharmaciens placés sous ses ordres et contribua, au péril de sa vie, à arrêter les ravages de la contagion. Cinq fois dans le cours de cette guerre, il fut fait prisonnier et entièrement dépouillé par des hussards prussiens :

« Je ne connais pas, dit-il, de plus habiles valets de chambre que ces hussards, ils m’ont déshabillé plus vite que je ne pouvais le faire moi-même; du reste, ils ne m’ont fait aucun mal, ils ne m’ont pris que mes habits et mon argent. »

Il fut fait prisonnier, emmené en Prusse, enfermé dans une forteresse où on ne lui donna pour toute nourriture, que des pommes de terre. Cet aliment passait alors pour le plus vil et ne servait qu’à la nourriture des bestiaux; bien plus, les préjugés prétendaient qu’il était nuisible à l’homme, qu’il causait des épidémies, donnait la fièvre, épuisait la terre, en somme que c’était un végétal vénéneux, étant de la famille des solanées, comme la belladone, la morelle, etc.

Parmentier, dans sa prison, trouva le tubercule nourrissant, salutaire et très  économique; il forma dès lors le projet, s’il était rendu à la liberté, de se dévouer à la propagation de cette plante originaire du continent américain, importée en Espagne au XVe siècle, et cultivée en France cent ans plus tard.

Mis en liberté, Parmentier se rendit à Francfort, ou il logea chez Meyer, chimiste distingué, avec lequel il étudia les méthodes pharmaceutiques usitées dans le Nord, et se mit en relations avec des savants. Rentré à Paris en 1763, Parmentier se remit au travail, suivit les cours de physique de l’abbé Nollet, de Pimprez, rentra en pharmacie et concourut pour une place aux Invalides qu’il obtint, et qu’il conserva jusqu’à la suppression de cet emploi. Parmentier reçut, en compensation, une pension de douze cents livres et un logement.

La disette de 1769 avait profondément ému les esprits sérieux; l’Académie de Besançon mit au concours cette question : Quels sont les végétaux nourrissants qui, dans les temps de disette, peuvent remplacer les aliments ordinaires ?

Parmentier saisit cette occasion pour présenter la pomme de terre, il en fit valoir tous les avantages, sa facile reproduction, la modicité de son prix et sa puissance alimentaire. L’Académie examina son mémoire et lui accorda une médaille, que le modeste savant se fit un devoir d’offrir à l’église du Saint-Sépulcre de Montdidier, où il avait reçu le baptême.

Dès lors, Parmentier se livra à une étude plus particulière de la pomme de terre, il en fit l’analyse, trouva sa fécule, démontra son emploi dans l’industrie, dans la panification; il résuma ses découvertes dans un ouvrage publié en 1773. Il s’occupa aussi des procédés pour le blutage des farines, du mode défectueux de faire le pain et publia le Parfait Boulanger, ouvrage dans lequel il s’occupa de la panification de la pomme de terre; il fit aux Invalides, en présence des savants de l’époque, des expériences qui furent couronnées de succès. Le biscuit de Savoie, ornement de nos desserts, qui a pour base la fécule de pomme de terre, est dû au philanthrope  Parmentier.

Notre compatriote savait tirer de cette plante les produits les plus opposés : il en faisait à sa volonté du pain ou de l’eau-de-vie. Il donna un jour à de nombreux convives un dîner dans lequel on ne servit que des pommes de terre, et deux sortes de pains faits avec ce même tubercule. C’est vers cette époque que Parmentier vint à Montdidier; il y fut reçu avec empressement; il n’oubliait pas sa famille et venait en aide à sa mère. Les laboureurs profitèrent de sa présence pour le consulter sur la maladie des blés dont beaucoup de champs avaient été atteints. Le chimiste fit des expériences et constata que le blé noir, la carie du froment, était due à un parasite; il préconisa le chaulage comme moyen préservatif.

Grâce à la persévérance de Parmentier, la culture de la pomme de terre se propagea en France; le gouvernement lui accorda, en 1787, cinquante arpents dans la plaine des Sablons que l’on regardait comme totalement stériles; il les ensemença de pommes de terre, et les Parisiens furent étonnés de voir une végétation brillante couvrir cette terre inculte. Pendant le jour, Parmentier faisait garder avec soin le champ par des soldats,  mais durant la nuit, ils se retiraient; alors les maraudeurs venaient lui dérober ses tubercules, ce dont il était enchanté :

« Si l’on vole la pomme de terre, dit-il, c’est qu’il n’existe plus de préjugé contre elle. »

Lorsque la fleur fut épanouie, il en présenta un bouquet à Louis XVI en lui disant :

 Sire, désormais, la famine est impossible.
— Monsieur Parmentier, répondit le roi, des hommes tels que vous, on ne les récompense pas avec de l’argent, il y a une monnaie plus digne de leur cœur, donnez-moi la main et embrassez la Reine » (1) .

Louis XVI mit le bouquet à sa boutonnière, les courtisans s’empressèrent de suivre son exemple; dès lors le succès de la pomme de terre était assuré; Parmentier en fit des distributions pour en propager la culture.

Le savant François de Neufchâteau avait proposé de remplacer la désignation impropre de pomme de terre par celle de Parmentière; cette dénomination, favorablement accueillie par les savants et les agronomes, ne put faire triompher de la routine. Ce nom aurait eu cependant l’avantage de rappeler celui de Parmentier, fort oublié aujourd’hui.

A la mort de ce philanthrope, survenue le 17 décembre 1813, la France récoltait environ cinquante millions d’hectolitres de pomme de terre; c’était le résultat d’une volonté énergique qu’aucune difficulté ne pouvait arrêter.

La ville de Montdidier fit élever une statue à son illustre enfant; elle fut inaugurée le 28 juin 1848, au milieu d’une nombreuse assistance de notabilités et de membres de Sociétés savantes. Parmentier est représenté debout, en costume de membre de l’Institut, tenant à la main droite une plume dans les doigts, des épis de maïs, un tubercule et quelques plantes, la main gauche est appuyée sur un livre; le piédestal est couvert de quatre bas reliefs rappelant les différents épisodes de la vie du savant Montdidérien.

(1) Notice historique et biographique sur Antoine Parmentier, par Hourdequin de Beaupré, « antiquaire. Montdidier, 1893. 

« Le Cultivateur aveyronnais. » 29 octobre 1893.
Photo de C. Gogry. Statue de Parmentier, à Montdidier. 1905.

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